100 ans EGMF | Le discours de George A. Forrest à Bruxelles
Le 21 décembre 2022, George A. Forrest et Malta D. Forrest ont tenu une réception à Bruxelles à l’occasion des 100 ans de l’Entreprise Générale Malta Forrest.
De nombreuses personnalités ont assisté à cet événement exceptionnel.
George A. Forrest et Malta D. Forrest ont pris la parole pour évoquer le parcours de l’entreprise, les valeurs qu’ils défendent et leur vision de l’entreprenariat.
L’intégralité du discours de George A. Forrest :
Mesdames et Messieurs distingués invités,
Chers amis,
Il me plait de prendre la parole ici devant vous tous – famille, amis, proches, collaborateurs, partenaires. Nous nous retrouvons dans la chaleur de notre affection commune pour célébrer, en cette année 2022, un siècle de rêves et de réalisations du Groupe Forrest International.
J’ai une pensée émue pour mon père Malta Victor Forrest, un semeur de rêves, un pionnier et bâtisseur à qui nous devons ce bel itinéraire entrepreneurial. Mes pensées vont également vers tous les miens aujourd’hui disparus : ma mère, Rachel Forrest, qui fut la force inspirante des débuts, mon regretté frère Victor, trop tôt arraché à notre affection, mes sœurs, Violette et Hilda.
Dans le même élan, avec ferveur, j’ai une pensée pieuse pour ma regrettée épouse Maggy, une générosité trop tôt partie, mais qui a tant semé en un temps si court.
Ici et maintenant, une fois encore, je tiens à saluer ma chère Lydia, ma compagne lumineuse de tous les jours et lui dire que les mots me manqueraient si je voulais tout lui dire. Mais je sais que son cœur comprend le mien car mon cœur est dans le sien.
A ce stade de mon propos, je tiens à remercier du fond du cœur trois magnifiques dames qui, depuis plusieurs mois, sont sur la brèche et n’ont ménagé aucun effort pour la réussite du centenaire.
Il s’agit de Caroline De Clercq, la dynamique responsable de la communication du Groupe, de Pascale De Maesschalck, ma très dévouée assistante, depuis 18 ans à mes côtés à Wavre, et de Sophie Houart, mon efficace Assistante de Direction.
Je voudrais aussi remercier tous ceux qui, souvent dans l’ombre mais avec un dévouement tout particulier, ont contribué à la réussite de la commémoration du centenaire d’EGMF.
Je pense aussi à tous les collaborateurs qui ont, un siècle durant, travailler d’arrache-pied pour faire de notre Groupe un fleuron industriel africain. Ce succès est indéniablement le leur. Qu’ils reçoivent ici, solennellement, ma sincère gratitude.
Il y a quelques semaines, lors des festivités avec tous les milliers de collaborateurs à Kolwezi, à Kinshasa, à Lubumbashi et aussi dans mon livre Un siècle de rêves publié par la maison d’édition française « Cherche Midi », j’ai évoqué mon parcours, mes combats, mes rêves, mes échecs, mes blessures, mes succès. Dans ces pages, j’ai ouvert mon jardin secret pour laisser paraître ma part intime en parlant de mon épouse, de mes enfants, de mes amis ainsi que des hommes et femmes qui, avec moi, ont rêvé et rêvent encore de changer le destin d’un continent aux potentialités nombreuses mais qui fait encore face à des défis cruciaux liés au développement économique et à l’inclusion sociale.
Dans ces pages, j’ai également donné ma part de vérité face aux attaques et calomnies de quelques apôtres du déclin qui, sans enquêtes sérieuses, sans vérifications sereines, et presque toujours hors de toute approche contradictoire, ont été prompts à salir, blesser et à mettre en péril les efforts et les sacrifices d’hommes et de femmes qui au quotidien, à longueur d’années et de décennies, dans des contextes extrêmement difficiles, dans un environnement souvent hostile, payent de leurs personnes et prennent des risques pour créer des emplois, générer de la valeur ajoutée et donner du mieux-être à des personnes qui en ont grand besoin.
Mais comme l’a écrit dans ses « Pensées » Marc-Aurèle, Empereur de Rome, l’obstacle est matière à action. Ces adversités injustifiées ne m’ont jamais arrêté, ni détourné de mon chemin, elles n’ont pas non plus fait chanceler ma foi en notre capacité de transformer le réel si on a la conviction et la ferme volonté de le faire.
Mesdames et Messieurs, chers amis,
Commémorer le centenaire de notre Groupe ici à Bruxelles représente beaucoup pour moi car, à l’instar du Congo, ici aussi, je suis chez moi. Je suis fier de ma part d’humanité belge et fier d’être un citoyen de ce pays, cœur battant de l’Europe.
Ici, dans cette capitale politique de l’Europe, au carrefour des routes, des cultures et des échanges qui rythment le quotidien des entreprises, je suis heureux de rappeler ma conviction sur la nécessité de bâtir des économies fortes, soucieuses d’inclusion sociale et de développement durable.
Je suis un chef d’entreprise convaincu que la crise que nous traversons et qui menace nos équilibres sociaux trouvera des solutions dans notre capacité à moderniser nos économies, à créer massivement des emplois et à mettre en place des chaînes de valeurs puissantes qui fédèrent des énergies créatrices transnationales voire transcontinentales.
La mondialisation, ce formidable mouvement d’interconnexion des économies et des intelligences, nous offre l’opportunité de faire en sorte que les nations du monde s’enrichissent mutuellement, dans le principe du gagnant-gagnant.
Le Groupe Forrest International est un combat jalonné d’épreuves qui l’ont forgé et fortifié. Durant son siècle d’existence j’ai eu, plusieurs décennies durant, l’opportunité d’en assurer la plus haute responsabilité. A l’heure où je passe le relais à mes enfants, je souhaite partager avec vous une observation et une conviction. En ma position d’eurafricain, les pieds ancrés sur deux continents qui chacun me nourrit d’un humanisme fécondant et complémentaire, je souhaite que les deux terres ouvrent une nouvelle page dans leur histoire commune et inaugurent une nouvelle relation.
Depuis quelques années, au quotidien et du haut de mon expérience, je constate avec amertume que l’Europe perd du terrain en Afrique au profit d’autres puissances. Cette situation est le résultat de notre incapacité à nous adapter à une situation nouvelle née des profondes mutations qui n’ont pas encore fini de s’accomplir mais qui ont déjà radicalement transformé un continent.
L’Afrique, par son potentiel inouï et sa centralité incontestable est en passe de devenir un acteur majeur dans le concert des nations du monde. Nous avons fait preuve de condescendance et n’avons pas toujours su entendre son message. Nous ne sommes pas parvenus à sortir de notre histoire douloureuse avec ce continent en pleine mutation pour inventer une nouvelle relation dont la trame serait de lui parler non plus comme un continent dominé mais comme une entité avec laquelle il faudra désormais parler d’égal à égal. Or, comme le dit très clairement un rapport du Sénat français publié en 2013 et bien d’autres expertises avérées : l’Afrique est notre avenir.
Mesdames et Messieurs,
A présent, nous devons impérativement accepter d’avancer dans une réforme de l’ordre international comme nous y invite Macky Sall, Président de la République du Sénégal, qui assure actuellement la présidence tournante de l’Union Africaine.
Oui, il y a une inégalité et une injustice criardes dans la situation du monde. Et l’Afrique paye lourdement la facture des déséquilibres dont elle n’est nullement responsable. Elle paye le prix de l’inflation et de la hausse du dollar.
Et pourtant, dans ce monde qui chancèle entre apogée et apocalypse, il faudra impérativement s’entendre sur le nécessaire changement de l’ordre international, s’entendre sur des politiques qui prennent en compte les préoccupations légitimes des pays émergents. Il nous faut accepter de sortir de l’égocentrisme européen pour rejoindre tous ceux qui sont de bonne volonté et avec lesquels nous pouvons montrer et démontrer que les clivages stériles et la dangereuse division du monde ne sont pas une fatalité.
Mesdames et Messieurs distingués invités, ma conviction est qu’il y a dans ce continent une place pour tout le monde si on sait y aller non plus en maîtres conquérants et arrogants mais en partenaires attentifs et curieux, à l’écoute, dans le respect et la considération. Il est évident que nous ne pouvons pas nous payer le luxe d’être absents au rendez-vous de l’avenir. Et dire que nous y étions déjà, mais nous avons nous-mêmes scié la branche de notre assise en fragilisant et en délaissant les entreprises européennes qui, par l’endurance et la compétition, avec des résultats louables, y avaient acquis des positions importantes.
En effet, depuis quelques décennies, nous ne cessons de mettre en place des règles et des procédures qui ont eu pour conséquence de fragiliser nos positions et d’ouvrir les portes à nos concurrents des nouvelles puissances émergentes. Les nouveaux venus ont su faire preuve d’un réalisme et d’un pragmatisme qui leur ont accordé des parts de marché enviables.
A ce sujet, entre autres, comment comprendre, voire expliquer, cette nouvelle pratique consistant à fermer à tour de bras les comptes bancaires européens des nombreux résidents de la R.D.C. ?
Tout en restant attachés à nos principes, il faut, à notre tour, faire preuve de souplesse, de réalisme, afin de repositionner nos entreprises en Afrique pour mieux les soutenir dans un environnement très concurrentiel. C’est le prix à payer, et si nous ne le faisons pas pour revenir dans le jeu d’un vrai partenariat gagnant-gagnant, les autres continueront à faire ce qu’ils font.
Aussi, pour donner sens, force et cohérence à nos ambitions, il me semble urgent de reconsidérer certaines décisions contre-productives. Voilà pourquoi il faut impérativement que les autorités belges mais aussi les institutions européennes, obtiennent des banques qu’elles maintiennent ouverts les comptes des résidents et aussi ceux des sociétés opérant en R.D.C.
Mesdames et Messieurs,
Mon avis est qu’il faut redonner à notre histoire commune le sens de sa logique mais cette fois-ci dans un bel esprit de partenariat gagnant-gagnant. Il faut davantage soutenir et accompagner les entreprises européennes pour en faire de nouvelles sentinelles conquérantes et génératrices d’emplois et de valeur ajoutée. Cette nouvelle dynamique de coopération aura aussi pour effet de maintenir les jeunes africains dans leur pays en leur donnant du savoir en plus du leur, du savoir-faire pour tirer meilleur profit de leur extraordinaire créativité et du mieux-être plutôt que de ne laisser que le mirage de l’Europe. Oui, plutôt que de contribuer à les pousser vers des embarcations de fortune, à la merci de vagues meurtrières sur des mers déchaînées, avec les pays de départ et de transit, nous pouvons trouver les solutions appropriées au préoccupant problème de l’immigration et aux drames qui en découlent.
Je reste convaincu que nous pouvons relever ce défi des temps nouveaux lié à la survie de notre vieux continent. Et se battre pour cela, c’est demeurer fidèles à notre propre histoire qui reste solidement attachée au principe de la dignité et du respect de l’humain. Et pour aller dans ce sens, nous n’avons nullement besoin des fausses leçons de morale de certaines organisations dont les agissements sur le terrain sont bien souvent aux antipodes des idéaux dont elles se réclament et qui, au lieu de faire du business, devraient plutôt s’atteler à retrouver leur éthique première.
Personne ne connaît l’Afrique comme nous la connaissons. Elle aussi nous connaît et nous le savons désormais.
Mesdames et Messieurs, distingués Invités,
Puisque je parle de l’Afrique, je ne peux passer sous silence la terrible tragédie que vivent de nombreuses femmes sur le continent africain et plus particulièrement dans l’Est de la République Démocratique du Congo.
Encore aujourd’hui, elles y subissent des atrocités et des traumatismes indicibles. Elles sont toujours obligées de fuir leurs villages en y abandonnant tout à cause des violences qu’elles subissent. Elles sont devenues un butin de guerre et leurs corps confisqués sont des objets de plaisir, de tortures et d’humiliation.
Cette situation, vous en conviendrez avec moi, est inacceptable. C’est une tragédie qui nous interpelle tous et nous ne pouvons plus rester dans l’attitude stérile du spectateur. Il faut agir au plus vite et de la manière la plus énergique pour arrêter cette folie meurtrière qui est un crime contre notre humanité commune.
Il y a 12 ans, après m’avoir expliqué le travail remarquable que faisait le Docteur Mukwege en s’appuyant sur les prouesses chirurgicales du Professeur Cadière, Louis Michel m’avait demandé si je pouvais prendre en charge les missions d’une équipe de dix professionnels qui devaient, quatre fois par an, se rendre en RDC pour former le personnel de l’hôpital de Panzi. Avec enthousiasme, j’ai immédiatement donné mon accord pour accompagner cette noble cause. Actuellement, cette collaboration se poursuit auprès du Centre Médical du Groupe : « le C.M.C. », qui est l’hôpital de référence du grand Katanga.
Aujourd’hui, avec ce bel exemple de coopération Nord-Sud, au regard du chemin parcouru et des résultats obtenus, je veux vous dire combien je suis heureux d’avoir apporté mon soutien et celui de mon Groupe à ce dynamique projet de collaboration entre ces deux grands médecins qui sont aussi des militants infatigables de la défense de la dignité et des valeurs humaines. Et pour cela, je tiens, du fond du cœur, à remercier mon ami Louis Michel et saluer en lui le grand Homme d’Etat toujours au service de la Belgique.
Je tiens à rendre un vibrant hommage au Professeur Guy-Bernard Cadière, chirurgien au CHU de Saint-Pierre, et à son équipe dont on connaît les nobles engagements au service de la population congolaise pour soulager la souffrance des femmes mutilées par les violences sexuelles.
Mesdames et Messieurs,
Au moment de clore mon propos en ce soir de célébration, je sais que je serais incomplet et surtout impardonnable si je ne donnais pas la clé du succès de notre traversée d’un siècle de labeur et de combats. Et cette clé, c’est bien celles et ceux qui ont donné le meilleur de leur personne pour nous offrir cette belle et émouvante rencontre de souvenirs, d’amitié et convivialité.
Ici et maintenant, haut et fort, je tiens à dire que nos plus grands succès, nous les devons incontestablement à une merveilleuse armée de soldats composée par des âmes généreuses et des cœurs vaillants qui ont porté et accompagné sur plusieurs générations le rêve d’un homme pionnier-bâtisseur et le combat d’une famille.
Au nom des miens et au nom du Congo, je voudrais du fond du cœur exprimer ma profonde gratitude et ma reconnaissance sans limites à tout le personnel du Groupe.
Mille mercis du fond du cœur à ces milliers d’hommes et de femmes qui ont fait du Groupe Forrest International un fleuron des économies africaines. Ils sont les veilleurs infatigables d’une belle aventure humaine.
Pour ma part, dans cette aventure et toujours à son service, je continuerai à vos côtés comme Président du Groupe. Quant à la direction générale, épine dorsale de ce joyau symbole d’un Congo nouveau dans une Afrique nouvelle, je l’ai confiée à mon fils ainé, Malta David.
Solidement arrimés à la grande famille des dynamiques collaborateurs de l’Entreprise Forrest, Malta David, George Andrew, Michael Igor et Rowena auront en charge la poursuite de l’aventure lancée il y a un siècle par leur grand-père Malta Victor Forrest.
Que vive le Groupe Forrest International !
Je vous remercie de votre aimable attention.
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